dimanche, juin 03, 2007

Villar de Mazarife --> Ospital de Orbigo

Cette journée, nous marchons très peu. Une fête médiévale se déroule dans un village proche et Cristina insiste pour y passer la nuit. Je dois céder contre mon gré car j'aurais aimé marcher plus, nous stoppons notre marche à onze heures seulement.
Je n'apprécie pas particulièrement ces fêtes de village surtout destinées à vendre des bracelets ou des savons parfumés à la lavande, mais je dois reconnaître que la fête est assez jolie, la plupart des habitants pour l'occasion se sont costumés et il y a beaucoup d'animation. Comme en Bretagne, il y a des joueurs du biniou, et sur les étal il y a des gâteaux bien gras et les constructions ne sont plus aussi hautes. Et pour dormir nous trouvons un confortable monastère : les sanitaires y sont neufs, un patio tranquille permet au pèlerin de se relaxer et contrairement à l'habitude, une prop. Je m'achète Le Monde et je vais lire près d'un pont médiéval. Je suis en vacances.

Nous faisons la connaissance d'un authentique barbu, un de ces originaux qui sillonnent inlassablement le chemin en long en large et en travers. Il se nomme Marcello, sa barbe hirsute ne laisse planer aucun doute sur son authenticité, en outre son accoutrement impressionne : sur sa robe de bure, des coquilles sont accrochées, il en a partout, jusque sur ses chaussures ! Il m'intrigue et je lui pose une question. Trop heureux il embraye et nous raconte son histoire en commençant par s'étonner que nous n'ayons pas entendu parler de lui. Il est l'auteur de plusieurs livres et il a soi-disant sa photo dans toutes les albergues du chemin. Il a commencé le chemin en 1961, cette année, seulement 26 pèlerins avaient pris le départ pour Santiago. À cette époque, le chemin était beaucoup plus dur et n'avait pas grand-chose de commun avec celui que nous faisons. Marcelino n'en conçoit aucun regret cependant. Sans douches, il devait parfois dormir sous les ponts et longer les nationales, il arrivait finalement très puant à Santiago. Cependant, l'homme est un peu usé, et déraille très facilement, rebondissant, sur chaque propos, il débobine toute la pelote de ses histoires avec empressement. Il finit par nous raconter toute l'histoire du chemin en commençant par le moyen-âge. Les légendes, la manière de vivre... il s'arrête parfois au milieu d'une phrase et se met à chercher dans sa mémoire comme un disque dur à bout de souffle.

Plus tard, je rencontre le basque Manuelo et le valençais Antonio, deux grands marcheurs de soixante ans qui s'enfilent chacun une quarantaine de kilomètres tous les jours. Ils partagent avec nous leur chorizo et leur fromage, et n’arrêtent pas de parler, tous les deux ont un tel appétit de la vie que c'en est épuisant.